Le grand coeur de Jean-Christophe Rufin
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Editions Gallimard - 498 pages
Littérature française
Dans la chaleur d'une île grecque, un homme se cache pour échapper à ses poursuivants. Il évoque sa vie hors du commun et tente de démêler l'écheveau de son destin.
Fils d'un modeste pelletier, il est devenu l'homme le plus riche de France. Il a permis à Charles VII de terminer la guerre de Cent Ans. Il a changé le regard sur l'Orient. Avec lui, l'Europe est passée du temps des croisades à celui de l'échange. Comme son palais à Bourges, château médiéval d'un côté et palais Renaissance de l'autre, c'est un être à deux faces. Aussi familier des rois et du pape que des plus humbles maisons, il a voyagé à travers tout le monde connu.
Au faîte de sa gloire, il a vécu la chute, le dénuement, la torture avant de retrouver la liberté et la fortune.
MON AVIS :
Jean-Christophe Rufin nous convie à suivre la belle aventure de Jacques Coeur, homme d'ambition qui aura connu les plus grands avant de tomber en disgrâce. Une plongée intimiste dans la vie d'un homme qui nous livre ses pensées et ses espoirs, sa quête de bonheur et la concrétisation de ses rêves.
Un roman riche et ambitieux, porté par une écriture fluide qui, s'il ne se départit pas de certaines longueurs, n'en demeure pas moins une belle expérience de lecture.
Une oeuvre, pleine et forte, à découvrir !
C'est une grande douleur de tout perdre et d'être condamné, mais c'est une immense leçon d'être jugé et j'oserai dire que c'est presque un privilège. Quiconque n'a pas vécu l'épreuve de la disgrâce, du dénuement et de l'accusation ne peut prétendre connaître véritablement la vie.
La liberté que j'ai cherchée si loin et avec si peu de succès, je l'ai découverte en écrivant ces pages. Ma vie vécue fut tout entière effort et contraintes, combats et conquêtes. Ma vie revécue pour en faire le récit a repris la légèreté des rêves.
De créature, je suis devenu créateur.
Pour avoir rencontré bien des hommes de pouvoir dans ma vie, je sais qu'on peut les ranger en deux grandes catégories. Il y a ceux qui exercent leur autorité par la force qu'ils dégagent. Ceux-là sont souvent chefs de guerre ou de parti (...)
Mais il est une deuxième espèce, beaucoup plus rare et surtout plus redoutable, qui tire son pouvoir de sa faiblesse. Les êtres de cette sorte se présentent désarmés, vulnérables, blessés. Placés par la destinée à la tête d'une nation, d'une armée ou d'une quelconque entreprise, de tels hommes font l'aveu, par leur apparence, qu'ils sont impuissants à remplir leur tâche, mais ne peuvent se résoudre à l'abandonner. L'acceptation du sacrifice est si manifeste chez eux qu'elle déclenche l'admiration et l'envie sincère de se mettre à leur service. Plus ils sont faibles, plus ils recrutent de force autour d'eux. Chacun fait assaut de bravoure pour les satisfaire et ils acceptent cet hommage sans se départir de leur air misérable. Ces rois fatigués sont les plus dangereux.